Il y a peu j'ai eu l'occasion de découvrir L'héritière de Jeanne A. Debats, à la suite de quoi on m'a proposé d'interviewer cette auteure.J'ai forcément sauté sur cette magnifique opportunité de faire plus amples connaissances avec cette dernière.
Je tiens à remercier Actu SF pour leur confiance .
Retrouvez Jeanne A Debats sur son blog Le blog de Jeanne-A Debats ou sur la page Facebook qui lui est consacrée ICI
J'ai été
conquise par L'Héritière,
premier tome de votre saga Testament.
Savez-vous quand notre curiosité sera repue avec le prochain tome de
cette saga ? Combien de tomes risquent de voir le jour ?
J'ai prévu une trilogie ou
du moins une histoire en trois volets, les deux suivants ne seront
pas forcément des romans. Ils sont dans ma tête et ils n'en
sortiront que sous la sommation de mon éditeur Jérôme Vincent. Ou
alors je me fendrai de deux novellas, ou du numérique, si la
conjoncture économique (toujours elle) ne se prête pas à une
trilogie en bonne et due forme.
Toutefois,
dans le deuxième round Alouettes
(titre non contractuel), une épidémie de Roméo et Juliette
menacera
l'univers connu et l'Altermonde tandis que le troisième
(pas de titre encore) verra la venue de l'humain absolu.
Mais il faut
savoir que L’Héritière
se situe dans un contexte plus vaste, un univers en formation depuis
2006 et qui comporte déjà un roman Métaphysique
du Vampire ainsi qu'une dizaine de nouvelles
et novellas parues sur divers supports.
Le monde selon
Navarre est déjà bien circonscrit. Il raconte une très longue
histoire traversée de personnages récurrents qui se croisent ou
croisent Navarre depuis 1936 jusqu'à la fin du monde, pour l'instant
(j'envisage aussi un récit vampirique se situant au quatorzième
siècle, un Navarre Untold,
mais ça, ce n'est pas mûr du tout).
Mon projet est
de visiter avec eux tous les genres de
l'Imaginaire que
j'affectionne. Métaphysique
flirtait avec "James Bond", tandis que L'Héritière
aborde le côté paranormal romance
de la force, où Navarre cède la parole à Agnès, car
traditionnellement dans ce genre, ce sont les femmes qui parlent.
(Et puis ça
me change et me rafraîchit agréablement.)
La SF pure, la
fantasy, la high fantasy,
la fantasy urbaine, le roman d'espionnage, le steampunk, le post-apo,
le thriller, l'ésotérique, j'ai déjà coché toutes ces cases, il
m'en manque encore quelques-unes. J'ai prévu d'écrire également un
western et de l'heroic fantasy.
Quelques
auteurs françaises du fantastique et notamment dans l'urban
fantasy (Cassandra O'Donnel, Sophie
Jomain...) déportent leur action à l'étranger. Pourquoi avoir fait
un choix si parisien ?
D'abord parce
que j'adore Paris, c'est ma ville, celle où j'ai grandi et que c'est
pour la plupart des gens sur cette planète une destination de rêve.
J'y marche et chaque jour je découvre une nouvelle source de beauté,
de rire, de frisson ou d'émerveillement. Pourquoi aller chercher
ailleurs ? Paris, dans L'Héritière,
est un personnage à part entière, sa géographie, ses entrailles,
ses mouvements d'humeur accompagnent mon héroïne.
Et puis l'on
parle bien de ce que l'on connaît bien. J'aurais personnellement
l'impression de tenter de copier plutôt mal les Anglo-saxons dans ce
qu'ils ont de meilleur : la traduction de leur univers
fantastique. Le nôtre est tout aussi intéressant et, de plus,
consacré par une tout aussi vraie et solide tradition littéraire et
populaire. Pourquoi s'en passer ?
Ensuite, je
fais de la pédagogie, j'avoue. Je suis professeur aussi, mes élèves
n'imaginent plus qu'une aventure puisse arriver à un Français, ou
plus généralement un Européen. Tous leurs héros s'appellent John
ou Sookie. (Parce que, eux, ont des héros, non des personnages, ils
ne font pas encore la distinction et c'est rafraîchissant). Or ça
ne m'intéresse pas non plus de lire sous leur plume comme sous
celles de certains auteurs un succédané mal branlé des réussites
outre-Manche ou outre-Atlantique. Harry
Potter, La Communauté
du Sud, Twilight,
pour ne citer qu'eux et sans préjuger de leurs qualités
intrinsèques, ça n'est pas nous, ça ne nous ressemble pas, même
si nous y trouvons plaisir. Je ne suis pas spécialement
nationaliste, voire pas du tout politiquement, mais j'estime qu'il y
a une certaine personnalité à préserver, ne serait-ce que pour
nous démarquer stylistiquement de nos voisins et conserver un
minimum d'originalité, de marque intime.
Quel plaisir
peut-on avoir à copier (forcément mal en plus) ce que tout le monde
fait ?
C'est
peut-être contradictoire pour quelqu'un qui prétend jouer avec les
genres déjà définis et leurs codes, et qui donc s'amuse avec des
situations stéréotypées d'une certaine façon, mais si je n'y mets
pas ma patte, mon vécu, ma passion au profit d'un monde calqué sur
d'autres, comment m'y impliquer vraiment ?
Agnès est une
héroïne assez introvertie pour le moment va-t-elle beaucoup évoluer
dans les prochains tomes ?
Sur certains
points non, son regard décalé et cynique demeurera. Mais elle va
grandir bien sûr, perdre de sa naïveté. Après, je n'ai pas
l'intention d'en faire une Lara Croft non plus. Je veux une fille
normale qui se débat avec ses angoisses, ses défauts, ses
indignations personnelles, ses problèmes quotidiens. Ce ne sera
jamais une super héroïne. La voisine, nous, quoi.
George R R
Martin dit se débarrasser de ses personnages sans problème lorsque
l'intrigue le réclame. On perd un personnage assez central dans
cette aventure. Êtes-vous comme lui sans état d'âme ou y a-t-il un
attachement envers ces personnages qui rendent les choses moins
simples ?
Je suis trop
rationnelle et trop pragmatique pour ne pas partager la position de
Mr Martin. J'entends souvent certains de mes collègues dire que
leurs personnages prennent vie et font un peu ce qu'ils veulent,
c'est une sensation que je n'ai jamais ressentie ; sauf une fois
dans un de mes premiers romans : le personnage me devenait si
antipathique, il m'échappait effectivement tant que je n'ai pas
écrit la suite de l'histoire. Celui qui meurt dans L’Héritière
devait mourir car il avait rempli son office
et POUR remplir son office : libérer une partie de la
personnalité d'Agnès.
Dans mes romans ou
nouvelles, il n'est pas rare du tout que certains personnages
centraux meurent, je n'ai pas de problèmes avec ça.
J'adore les
histoires avec une cohabitation entre les créatures surnaturelles.
Dans ce tome, on en côtoie bon nombre. Y aura-t-il d'autres genres
de créatures dans les prochains opus ? Quelle « race »
a votre préférence ?
Le principe du Monde selon
Navarre est que tous les rêves de l'humanité ont une réalité dans
l'AlterMonde. Tous les panthéons, toutes les créatures s'y croisent
et y négocient leur place sur la Terre à l'insu des humains. Il y a
un propos fondamentalement humaniste là-dessous.
Le second volet verra des
kitsune, des faunes, un dieu primordial, il y aura de quoi faire :)
Sinon, je ne pense pas en
termes de race, mais de personnages, ce sont eux qui m'intéressent
et mon chouchou est et restera à jamais Navarre, je pense.
Place aux questions plus personnelles.
Comment
construisez-vous vos sagas ? Tout est prévu à l'avance avec le
nombre de tomes ou plutôt comme le vent vous porte ?
On définit en
général deux types d'écrivains, les scripturaux qui écrivent au
fil de la plume et les constructeurs qui mettent en place le synopsis
largement en amont. Je participe un peu des deux, selon le type de
récit auquel je m'attaque.
En général, lorsque j'écris en
jeunesse je suis assez constructiviste parce que mon éditeur Denis
Guiot aime bien savoir où vont les romans qu'il envisage de publier.
Pour Navarre, la plupart du temps, je commence avec une idée de
base, un propos à défendre (je suis une SFiste dans l'âme, il y a
TOUJOURS un ou plusieurs propos sous-jacents dans mes histoires, je
ne sais pas écrire autrement) le reste vient en écrivant.
L'Héritière
est le premier ouvrage de votre main que je
découvre. En me renseignant un peu, je me suis rendu compte que le
fantastique est indéniablement votre genre. Pourquoi cette
orientation ? Avez-vous déjà eu envie de toucher à un autre
genre ?
Alors, en
fait, je suis plutôt, je l'ai dit plus haut, une écrivain ou une
auteur (j'ai horreur d’auteure et écrivaine, contrairement à ce
qui a été dit ailleurs dans certains articles mal renseignés me
concernant) de science-fiction par nature et par destination.
Je suis
entrée en littérature avec de la science-fiction, elle représente
la partie centrale, sérieuse, revendicative, de mon oeuvre et c'est
évident en jeunesse où je n'ai jamais écrit de fantastique.
Le Monde selon
Navarre n'est qu'une partie de mon écriture, presque un accident.
J’en ai écrit les premières histoires un peu par hasard. Mais je
me suis aperçue au fil du temps et à mesure que les récits
s'accumulaient pour former un tout cohérent que le versant joueur,
expérimental et provoc de ma personnalité d'écrivain y trouvait
son compte. Le fantastique est un genre qui se prête
merveilleusement à la provoc et la transgression or j'adore ça.
Quand
écrivez-vous ? (La nuit, sous pression, tout le temps…)
J'écris très
tôt le matin, à partir de 5 h 30, une habitude que j'ai
prise du temps de la petite enfance de mes garçons. Le matin,
c'était LE moment où on me fichait la paix. Ils sont grands
maintenant et ils ont tout à fait compris qu'il y a une section
spéciale de l'enfer réservée à ceux qui viennent demander où
sont leurs chaussettes à un écrivain au travail, mais j'ai conservé
le rythme. Il me convient, en fait.
Avec qui
aimeriez-vous travailler ? (mort ou vivant)
J'aurais adoré
écrire un jeunesse avec Robert Heinlein, bosser sous la houlette
d'Élisabeth Gilles ou travailler avec l'homme de ma vie sur un
roman, un scénario de film ou de bande dessinée, un album jeunesse,
que sais-je ? Nous ferons ça un jour quand tous nos projets
personnels actuels seront terminés.
Des salons où
on vous retrouve en 2015 ?
Montreuil
d'abord, Toulouse Manga, Chambéry, Meyzieux, les Imaginales
(peut-être)
Projets
pour 2015 ?
Je
suis en train d'écrire une nouvelle de fantasy pure et dure hors le
Monde de Navarre, j'ai un jeunesse dans les tuyaux pour les éditions
Syros (pas encore finalisé comme projet), dont mon dernier roman
chez eux, Pixel
Noir a remporté
le Prix européen jeunesse des dernières Utopiales.
Puis
il y a Imajighane,
mon dernier roman de SF pour L'Atalante que je vais bien "finir
par finir" un jour, et sur lequel je rame depuis deux ans. Il
est difficile, il est dur, il remue des tas de choses en moi et je ne
parviens pas toujours à accepter de les remuer. Un jour, il sortira.
Un péché qui
vous caractérise ?
La luxure et
la gourmandise qui vont si bien ensemble.
Merci encore à
vous pour ce voyage dans l'univers d'Agnés et de Navarre.
Merci de votre
patience et de votre disponibilité pour cette petite interview.
Retrouvez une partie de sa bibliographie sur les éditions actusf
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Bonjour Karine,
RépondreSupprimermerci pour cette intéressante ITW.
Dis ?
On m'a signalé que dans la réponse à la question sur mes pratiques d'écrivain, je m'étais joyeusement mis la confuse bleue avec "aval", qu'il faudrait si c'est possible remplacer par "amont"
je te remercie et te souhaite bonne continuation
Jeanne
corrigé Jeanne
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